Autorité et bienveillance |
Autorité et bienveillance
éducation bienveillante, éducation positive
Education positive - Le rôle des neurones miroirs dans l'éducation
Notre
pensée est portée par notre cerveau, lui-même constitué de neurones qui
s’associent, se combinent entre eux et créent des circuits qui permettent aux informations
de circuler, d’être encodées puis stockées dans les zones appropriées, par un
processus chimique et électrique complexe.
Ainsi,
en fonction des actions que nous exécutons, différentes zones de notre cerveau
sont activées. Ce ne seront pas les mêmes circuits neuronaux qui seront mis à
contribution selon que nous plantons un clou, écoutons de la musique ou
effectuons une addition ou selon que nous ressentons des émotions de joie, de
peur ou de colère.
Il
est aisé de comprendre cela mais ce qui est étonnant, c’est que certains
neurones s’activeront dans la même zone du cerveau selon que nous observons, imaginons ou exécutons
nous-mêmes une action. Pour le dire simplement : si nous regardons un joueur
de tennis, mentalement nous jouons aussi ; si nous observons quelqu’un en
train de manger, intérieurement nous mangeons aussi – et d’ailleurs, certains
saliveront. Il en est de même pour les émotions : voir quelqu’un rire
active notre joie intérieure, voir quelqu’un pleurer active notre tristesse.
Ainsi
parle-t-on de neurones miroirs, en
ceci qu’ils reproduisent en nous les
phénomènes que nos sens perçoivent à l’extérieur
de nous.
Les
conséquences de cette découverte sont primordiales dans le domaine qui nous
préoccupe, car on ne peut plus seulement raisonner en terme d’exemple ou
d’imitation (l’enfant imite l’adulte, l’adulte donne l’exemple). Cela va plus
loin : des circuits neuronaux sont activés et entretenus par les phénomènes
que perçoivent les enfants – un geste affectueux perçu par l’enfant (par
exemple, maman et papa se donnent la main ou se prennent dans les bras) est
reproduit dans son cerveau ; de même pour les marques d’attention, de
politesse, de respect d’autrui, de l’environnement ou des animaux. Plus ces phénomènes
seront perçus souvent, plus les circuits neuronaux seront activés, balisés et
renforcés – plus ils seront donc constitutifs de leur personnalité et
considérés comme « normaux ».
Chez
tout adulte, les choses se produisent de la même façon, mais avec moins
d’intensité : le cerveau adulte est moins malléable, moins souple, moins
modifiable que celui des enfants – on parle de plasticité du cerveau. Notre capacité à créer de nouvelles connexions
neuronales est davantage réduite, les circuits sont davantage figés, ils sont plus
rigides. Notre personnalité est en place. Les nouvelles informations sont plus
difficiles à mémoriser, les nouveaux apprentissages plus compliqués à
assimiler.
A
cela s’ajoute le fait que le cerveau adulte dispose de moitié moins de synapses[2] que
celui d’un enfant de 2 ans. Ainsi les bébés peuvent percevoir plus de sons
« étrangers » que les adultes : les informations circulent mieux
chez eux et trouvent des chemins qui chez les adultes, qui n’ont pas entretenus
ces chemins, sont fermés.
Ces
fameux neurones miroirs ne se mettent évidemment pas en veille lorsque nous
regardons la télévision. Aussi, les scènes de violence que nous percevons dans
un film ou un reportage, nous les vivons
mentalement. Nous subissons de même les conflits, les disputes, les
comportements malveillants. Des canaux se creusent dans notre cerveau et sont
entretenus par une exposition prolongée et répétée à certaines images.
Un
adulte, dont le cerveau est moins plastique, comme nous l’avons dit, et dont la
capacité de raisonnement, d’analyse et de traitement de l’information est plus
grande, subira moins les effets négatifs de ce type d’exposition qu’un enfant.
C’est donc une responsabilité aussi de ne pas infliger à de trop jeunes enfants
des images de scènes violentes (qu’elles soient réelles ou fictives, car notre
cerveau ne les différencient pas : la violence dans un film de fiction est
traitée, sur le plan neuronal, de la même façon que la violence réelle).
Une
autre conséquence majeure de cette découverte réside dans la communication non verbale. Les gestes
que nous produisons, les expressions de notre visage et les intonations de
notre voix sont ressentis et vécus par l’enfant comme les siens propres, ils
nous mettent pleinement en communion avec lui.
En
effet, les neurones miroirs sont à l’origine de notre empathie. Grâce à eux,
rappelons-le, nous sommes en mesure de rire, pleurer et s’étonner avec autrui.
Aussi, dans son approche pédagogique, un éducateur aura tout intérêt à
mesurer et contrôler ces facteurs. Sa colère peut lui être brutalement renvoyée,
de même que sa bonne humeur, ses sourires et ses rires. Il aura tout à gagner à
créer une atmosphère bienveillante et chaleureuse autour de lui, les enfants la
capteront, la ressentiront, la vivront mentalement, l’imiteront et en auront
tous les effets bénéfiques.
[1] Ils ont été découverts
dans les années 1990 pas l’équipe du Dr Giacomo Rizzolatti (faculté de médecine
de Parme, Italie).
[2] Les synapses sont les
connexions entre les neurones : elles permettent la transmission des
informations d’un neurone à l’autre. Un cerveau adulte compte environ cent
milliards de neurones. Un neurone compte en moyenne dix mille synapses.
Extrait du livre Autorité et bienveillance.
Extrait du livre Autorité et bienveillance.
Education positive - Y a-t-il de bonnes et de mauvaises fessées comme il existerait de bons et de mauvais chasseurs dans la vidéo des Inconnus?
Chez certains adultes, il est courant de
considérer qu’il existerait de « bonnes fessées », par opposition donc
à de « mauvaises fessées » (comme il y a les « bons » et
les « mauvais chasseurs » dans la célèbre vidéo des Inconnus)
– reste alors à placer la frontière entre ce que serait une « bonne »
et une « mauvaise » fessée. Doit-on se référer à l’intensité des
coups, à l’instrument utilisé pour son administration, aux circonstances… ?
Il est important de rappeler qu’aujourd’hui, en France, deux enfants
mourront suite aux mauvais traitements de leurs parents – des bébés, pour
beaucoup, dont les parents ne supportent plus les pleurs et qui sont secoués
avec une extrême brutalité. On estime à plusieurs dizaines de milliers le
nombre d’enfants en danger en France (difficile d’avoir des statistiques
précises). Il n’est donc pas question d’aborder ces sujets avec légèreté.
Une « petite fessée » peut-elle être qualifiée de traitement cruel, dégradant ou humiliant ou même de violence corporelle ? Beaucoup d'adultes refusent de considérer comme violente une fessée qu'ils considèrent comme "éducatives".
En réalité, ce sujet ne se prête pas à une interprétation idéologique personnelle, puisqu'en toute objectivité les neurosciences répondent pour nous : oui, n’importe quelle fessée, « petite » ou
« grande », est à considérer comme mauvaise, néfaste et violente en ceci qu'elle occasionne des séquelles observables sur le cerveau et
bloque sa maturation.
Des
centaines d’études réalisées partout dans le monde (en Amérique du nord pour
l’essentiel), des milliers d’observations sur des milliers de cas menées par
des docteurs en biologie, spécialistes du cerveau, médecins, chercheurs
exerçant dans des universités réputées, sur des laps de temps suffisamment
importants pour que nous ayons le recul nécessaire à tirer des conclusions
scientifiques définitives et à établir des théories fiables, vont rigoureusement
toutes dans le même sens : les mauvais traitements, « petits »
ou « grands », physiques ou verbaux, occasionnent des perturbations
dans le développement cognitif et
affectif de l’enfant.
Extrait du livre Autorité et bienveillance.
Education positive - Le serpent de la punition qui se mord la queue
Pour simplifier à
l’extrême, on pourrait comparer la punition à un serpent qui se mord la queue : l’éducateur punit un enfant qui
se comporte de façon inappropriée => la punition bloque le développement des
zones du cerveau qui permettent à l’enfant de se comporter de façon appropriée
=> l’enfant se comporte de façon encore plus inappropriée => l’éducateur
punit davantage l’enfant. Et ainsi de suite.
Plus la punition est
grande, brutale et inexpliquée, plus le serpent grossit.
Extrait du livre Autorité et bienveillance, Julien Lavenu, LaboPhilo.
Télécharger l'image en PDF ici.
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L'éducation bienveillante et la question de l'autorité
LaboPhilo engage une action de sensibilisation des professionnels de l'enfance et des parents autour de la question de la bienveillance dans l'exercice de l'autorité éducative.
Parce que les enjeux fondamentaux pour le bien-être des mineurs, leur développement affectif et cognitif, que recouvre la notion d'autorité bienveillante doivent être portés à la connaissance des éducateurs, des animateurs et des parents, LaboPhilo propose un programme de communication sous différents axes:
- La publication d'un livre,
- La mise à disposition d'outils en téléchargement gratuit,
- Des sessions de formation à l'attention des professionnels de l'enfance,
- Des ateliers parentalité de sensibilisation,
- La mise en place d'une Charte de l'autorité bienveillante à l'attention des établissements d'accueil de mineurs.
Vers une définition de l'éducateur bienveillant: 2. La pyramide des interventions - un outil d'éducation positive
Un outil d'éducation positive: la pyramide des interventions |
Cette pyramide rend visuellement compte du
champ des interventions possibles qui se rétrécit progressivement à mesure que
la situation se désagrège dans la gestion du groupe : plus on s’élève, moins d’options s’offrent à l’éducateur,
et donc plus la situation se referme.
Zone 1 :
interventions non verbales.
Cette première zone, à la base de la pyramide,
représente tout un panel d’interventions peu contraignantes et donc utilisables
facilement et fréquemment. Ces interventions de désapprobation sont exprimées
de façon non verbale :
- mimiques faciales : rictus de la
bouche, sourcils froncés, regard insistant…
- manifestations gestuelles non bruyantes :
doigt tendu, doigt sur la bouche, main levée…,
- expressions
orales : « Chut ! », « Tss ! Tss ! »
(à éviter : les « eh » et les « oh »)…,
- manifestations gestuelles bruyantes :
petit coup sur la table avec le doigt, clap avec les mains (à proscrire :
les sifflements, les claquements de doigts, à réserver aux animaux domestiques)…
Ces interventions, adaptées aux âges du public (les
gros yeux, pour un petit de 3 ans par exemple, peuvent être très traumatisants)
sont en quelque sorte des « frappes chirurgicales », elles sont
ciblées : elles s’adressent à un enfant perturbateur bien particulier et
permettent de ne pas rompre le cours général d’une activité et sa fluidité.
Elles doivent être fermes et remarquées. Il s’agit pour l’animateur de se
montrer, de montrer qu’il n’est pas dupe de ce qui se passe et qu’il garde les
yeux ouverts.
Deux erreurs à éviter absolument :
- Faire
comme si on ne voyait pas qu’un enfant commence à perturber le groupe (et
s’imaginer que les choses vont se solutionner d’elles-mêmes).
- Ne pas
s’assurer que le perturbateur a remarqué le rappel à l’ordre de l’animateur (un
contact visuel appuyé fait l’affaire).
Zone 2 :
avertissements verbaux.
Dans cette deuxième zone, l’avertissement devient
verbal. Ce n’est en rien une menace mais un rappel des règles énoncées en début
d’activité et des conséquences possibles.
« Attention, si tu continues, que va-t-il se passer ? »
Dans un premier temps, on peut se contenter d’avertir
à distance (toujours en vertu du principe de préserver au maximum la fluidité
et de créer le moins de rupture possible dans le rythme de l’activité). Si cela
ne suffit pas, dans un deuxième temps, on demandera au perturbateur de se déplacer
jusqu’à soi, on le prendra à part pour lui demander de rappeler les règles.
Trois conseils :
- Eviter d’aller vers l’enfant dans ce genre de circonstances mais
préférer le faire venir jusqu’à soi afin qu’il soit bien conscient que l’animateur
contrôle la situation. Ne surtout jamais l’agripper pour le faire venir, il
doit venir de lui-même, sans contact physique.
- Ne pas prendre l’enfant par surprise et le sanctionner sans l’avoir
d’abord prévenu.
- Ne pas faire de cet événement un spectacle pour le reste du groupe
qui serait soit humiliant pour le perturbateur, soit, au contraire, un moyen
pour lui de faire rire les copains.
Zone 3 :
mise en application des conséquences annoncées.
L’étau se resserre, le perturbateur a été prévenu, et
la sanction est désormais inévitable : conséquence logique, application
des sanctions prévues en amont lors du rappel des règles, retrait pour une durée déterminée suivie, le soir, d’une discussion
bienveillante…
Ces interventions sont plus pénibles et donc ne
peuvent être multipliées à longueur de temps (à la différence des interventions
du bas de la pyramide ; plus on s’élève, plus le champ se restreint),
elles risquent de briser la relation bienveillante entre l’enfant et
l’animateur.
Il est parfaitement possible que le recours aux
sanctions prévues dans cette zone soit nécessaire. Mais l’animateur prendra
garde à n’y recourir qu’après être passé par les Zones 1 et 2 de la
pyramide d’interventions. A moins, cas exceptionnels, que la gravité d’une
situation l’exige : une bagarre peut soudainement éclater entre deux
individus que l’on n’aurait pas vu venir (il ne serait plus cohérent à ce
moment, de recourir à des interventions de Zone
1). En général, il y a toujours des signes avant-coureurs qui peuvent
prévenir l’animateur qu’une situation va dégénérer. D’où l’importance du rappel
que nous venons de faire : ne pas faire comme si on ne voyait pas, être
toujours attentif et sur le qui-vive.
Un animateur qui recourt régulièrement à cette zone
doit s’interroger sur la pertinence de son autorité.
Zone 4 :
mesures exceptionnelles.
Le sommet de la pyramide est consacré aux
interventions rarissimes et concertées : rapport à la hiérarchie, convocation
des parents, expulsion du centre du jeune perturbateur, etc.
Ce recours est parfois nécessaire mais il doit être
accompagné – par le ou les supérieurs hiérarchiques : coordinateur, responsable
de secteur, directeur ALSH... Il s’agit d’une décision non unilatérale, qui ne
relève pas de la seule responsabilité de l’animateur. Dans le meilleur des cas,
cette décision ultime doit s’inscrire dans un programme éducatif mobilisant
l’ensemble des acteurs concernés. Dans tous les cas, un animateur ne doit
jamais rester seul face à ce type de situations très compliquées, et doit réagir
bien en amont.
A
proscrire : la menace délirante.
La Zone 4
est la zone des mesures exceptionnelles, pas celle des mesures délirantes, elle
doit être annoncée dans les cas où elle est absolument indispensable, dans les
conditions que nous venons de voir.
On entendra par menace
délirante celle de recourir à l’application de mesures disproportionnées le
plus souvent irréalisables.
Quelques cas d’école de menaces délirantes déjà
entendues :
- appeler
la police,
- abandonner
l’enfant quelque part : dans le cinéma, seul devant son assiette à la
cantine…,
- abandonner
l’enfant à une personne inconnue : au chauffeur de bus, à la dame du
guichet du musée…,
- enfermer
quelque part,
- attacher sur
la chaise,
- scotcher
la bouche,
- laisser
seul le petit dans le dortoir,
- ne pas
changer un petit qui a fait pipi sur lui…
Recourir à la Zone
4 sous forme de menace délirante est à proscrire absolument, au moins pour quatre
raisons :
- Elle
n’aura aucune prise sur les individus qui posent généralement problèmes aux
éducateurs. Ces éléments réputés « à problèmes » sont habitués à être
menacés, disputés, punis de façon disproportionnée, malmenés, maltraités, etc.
L’éducateur n’arrivera à rien par la menace de sanctions délirantes qui ne les
impressionnent plus depuis longtemps – qu’on se souvienne du cas Pascal Mondain
dans Les Choristes.
- La menace
ne restant qu’une menace donc, par définition, non suivie d’effet, elle jouera
le rôle de renforçateur des comportements non désirés au lieu d’être dissuasive
– je perturbe le groupe => on me menace => cette menace n’aboutit jamais
=> ça m’amuse => je continue à perturber le groupe (voir les contingences de renforcement).
- La menace
individuelle ou collective sera traumatisante pour des enfants très jeunes et/ou
qui sortent rarement du cadre – des enfants hypersensibles, timides... Elle
sera dans ces cas à considérer comme pleinement maltraitante.
- La menace
ne restant qu’une menace fait perdre toute crédibilité à l’éducateur.
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