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Un outil d'éducation positive: la pyramide des interventions |
Cette pyramide rend visuellement compte du
champ des interventions possibles qui se rétrécit progressivement à mesure que
la situation se désagrège dans la gestion du groupe : plus on s’élève, moins d’options s’offrent à l’éducateur,
et donc plus la situation se referme.
Zone 1 :
interventions non verbales.
Cette première zone, à la base de la pyramide,
représente tout un panel d’interventions peu contraignantes et donc utilisables
facilement et fréquemment. Ces interventions de désapprobation sont exprimées
de façon non verbale :
- mimiques faciales : rictus de la
bouche, sourcils froncés, regard insistant…
- manifestations gestuelles non bruyantes :
doigt tendu, doigt sur la bouche, main levée…,
- expressions
orales : « Chut ! », « Tss ! Tss ! »
(à éviter : les « eh » et les « oh »)…,
- manifestations gestuelles bruyantes :
petit coup sur la table avec le doigt, clap avec les mains (à proscrire :
les sifflements, les claquements de doigts, à réserver aux animaux domestiques)…
Ces interventions, adaptées aux âges du public (les
gros yeux, pour un petit de 3 ans par exemple, peuvent être très traumatisants)
sont en quelque sorte des « frappes chirurgicales », elles sont
ciblées : elles s’adressent à un enfant perturbateur bien particulier et
permettent de ne pas rompre le cours général d’une activité et sa fluidité.
Elles doivent être fermes et remarquées. Il s’agit pour l’animateur de se
montrer, de montrer qu’il n’est pas dupe de ce qui se passe et qu’il garde les
yeux ouverts.
Deux erreurs à éviter absolument :
- Faire
comme si on ne voyait pas qu’un enfant commence à perturber le groupe (et
s’imaginer que les choses vont se solutionner d’elles-mêmes).
- Ne pas
s’assurer que le perturbateur a remarqué le rappel à l’ordre de l’animateur (un
contact visuel appuyé fait l’affaire).
Zone 2 :
avertissements verbaux.
Dans cette deuxième zone, l’avertissement devient
verbal. Ce n’est en rien une menace mais un rappel des règles énoncées en début
d’activité et des conséquences possibles.
« Attention, si tu continues, que va-t-il se passer ? »
Dans un premier temps, on peut se contenter d’avertir
à distance (toujours en vertu du principe de préserver au maximum la fluidité
et de créer le moins de rupture possible dans le rythme de l’activité). Si cela
ne suffit pas, dans un deuxième temps, on demandera au perturbateur de se déplacer
jusqu’à soi, on le prendra à part pour lui demander de rappeler les règles.
Trois conseils :
- Eviter d’aller vers l’enfant dans ce genre de circonstances mais
préférer le faire venir jusqu’à soi afin qu’il soit bien conscient que l’animateur
contrôle la situation. Ne surtout jamais l’agripper pour le faire venir, il
doit venir de lui-même, sans contact physique.
- Ne pas prendre l’enfant par surprise et le sanctionner sans l’avoir
d’abord prévenu.
- Ne pas faire de cet événement un spectacle pour le reste du groupe
qui serait soit humiliant pour le perturbateur, soit, au contraire, un moyen
pour lui de faire rire les copains.
Zone 3 :
mise en application des conséquences annoncées.
L’étau se resserre, le perturbateur a été prévenu, et
la sanction est désormais inévitable : conséquence logique, application
des sanctions prévues en amont lors du rappel des règles, retrait pour une durée déterminée suivie, le soir, d’une discussion
bienveillante…
Ces interventions sont plus pénibles et donc ne
peuvent être multipliées à longueur de temps (à la différence des interventions
du bas de la pyramide ; plus on s’élève, plus le champ se restreint),
elles risquent de briser la relation bienveillante entre l’enfant et
l’animateur.
Il est parfaitement possible que le recours aux
sanctions prévues dans cette zone soit nécessaire. Mais l’animateur prendra
garde à n’y recourir qu’après être passé par les Zones 1 et 2 de la
pyramide d’interventions. A moins, cas exceptionnels, que la gravité d’une
situation l’exige : une bagarre peut soudainement éclater entre deux
individus que l’on n’aurait pas vu venir (il ne serait plus cohérent à ce
moment, de recourir à des interventions de Zone
1). En général, il y a toujours des signes avant-coureurs qui peuvent
prévenir l’animateur qu’une situation va dégénérer. D’où l’importance du rappel
que nous venons de faire : ne pas faire comme si on ne voyait pas, être
toujours attentif et sur le qui-vive.
Un animateur qui recourt régulièrement à cette zone
doit s’interroger sur la pertinence de son autorité.
Zone 4 :
mesures exceptionnelles.
Le sommet de la pyramide est consacré aux
interventions rarissimes et concertées : rapport à la hiérarchie, convocation
des parents, expulsion du centre du jeune perturbateur, etc.
Ce recours est parfois nécessaire mais il doit être
accompagné – par le ou les supérieurs hiérarchiques : coordinateur, responsable
de secteur, directeur ALSH... Il s’agit d’une décision non unilatérale, qui ne
relève pas de la seule responsabilité de l’animateur. Dans le meilleur des cas,
cette décision ultime doit s’inscrire dans un programme éducatif mobilisant
l’ensemble des acteurs concernés. Dans tous les cas, un animateur ne doit
jamais rester seul face à ce type de situations très compliquées, et doit réagir
bien en amont.
A
proscrire : la menace délirante.
La Zone 4
est la zone des mesures exceptionnelles, pas celle des mesures délirantes, elle
doit être annoncée dans les cas où elle est absolument indispensable, dans les
conditions que nous venons de voir.
On entendra par menace
délirante celle de recourir à l’application de mesures disproportionnées le
plus souvent irréalisables.
Quelques cas d’école de menaces délirantes déjà
entendues :
- appeler
la police,
- abandonner
l’enfant quelque part : dans le cinéma, seul devant son assiette à la
cantine…,
- abandonner
l’enfant à une personne inconnue : au chauffeur de bus, à la dame du
guichet du musée…,
- enfermer
quelque part,
- attacher sur
la chaise,
- scotcher
la bouche,
- laisser
seul le petit dans le dortoir,
- ne pas
changer un petit qui a fait pipi sur lui…
Recourir à la Zone
4 sous forme de menace délirante est à proscrire absolument, au moins pour quatre
raisons :
- Elle
n’aura aucune prise sur les individus qui posent généralement problèmes aux
éducateurs. Ces éléments réputés « à problèmes » sont habitués à être
menacés, disputés, punis de façon disproportionnée, malmenés, maltraités, etc.
L’éducateur n’arrivera à rien par la menace de sanctions délirantes qui ne les
impressionnent plus depuis longtemps – qu’on se souvienne du cas Pascal Mondain
dans Les Choristes.
- La menace
ne restant qu’une menace donc, par définition, non suivie d’effet, elle jouera
le rôle de renforçateur des comportements non désirés au lieu d’être dissuasive
– je perturbe le groupe => on me menace => cette menace n’aboutit jamais
=> ça m’amuse => je continue à perturber le groupe (voir les contingences de renforcement).
- La menace
individuelle ou collective sera traumatisante pour des enfants très jeunes et/ou
qui sortent rarement du cadre – des enfants hypersensibles, timides... Elle
sera dans ces cas à considérer comme pleinement maltraitante.
- La menace
ne restant qu’une menace fait perdre toute crédibilité à l’éducateur.